Un roman sur l'exil, l'émigration et
la difficile communication entre les générations
Un chibani des trente glorieuses revient au pays, au bord de la mer. Il a eu 7 filles et un seul garçon. Sa femme est restée en France. Il n’a plus de nouvelles de ce « cher fils ».
Alma est écrivain public à la grande poste d’Alger. Sa maman qui est en Bretagne promet toujours de revenir et tarde à le faire. Son papa est musicien, il joue du luth.
L’histoire se déroule pendant la décennie noire, au moment où les attentats sont nombreux et où ils confisquent la vie. L’époque des intégristes qui détruisent un peu plus encore une jeunesse qui n’a rien demandé : « Nous, on ne pense pas, on pense rien, on veut vivre et on vit pas… chez nous presque tous les hommes ont pris le maquis pour la guerre de libération, ils sont pas tous morts, les vieux sont pensionnés, des petites pensions pas comme les autres, les colonels, les généraux, tout ça… Quelle guerre pour tous ces galons ? Le maquis ? Alors combien d’officiers supérieurs, s’ils sont encore vivants ? La guerre contre les islamistes ? La guerre civile ça donne des galons ? S’engager dans l’armée, dans la police, on aura du travail, on sera les plus forts contre les frères… On veut pas. On fait de la musique… »
Tous les jours, Alma retrouve le vieil homme qui a rempli sa vie dans les usines Renault de Billancourt et invariablement commence une lettre, toujours la même qui ne s’achève pas, par « Mon cher fils… ». C’est l’occasion pour le vieil homme de confier sa vie à cette jeune fille et de lui dire combien son fils lui manque. L’oreille de l’écrivain public est sans doute d’autant plus attentive et bienveillante qu’elle-même souffre da sa séparation avec sa mère. Ils partagent aussi tous les deux la difficile communication avec deux êtres chers. Petit à petit, Alma partagera ses confidences avec le vieil homme et ce sera aussi l’occasion pour elle de parler de la servante Minna, véritable seconde mère qui est une magnifique conteuse.
Au fil des pages, on apprend que le vieil homme n’a jamais pu ou n’a jamais su parler de sa vie à son fils lorsqu’il était avec lui en France. C’est pas faute d’avoir tenté pourtant. Une fois, lors d’une tentative, le vieil homme a entendu son fils pour la dernière fois : « … c’est tes histoires et l’Algérie je n’ai pas envie d’en entendre parler, ni la guerre, ni avant la guerre, ni rien. La vie c’est le présent et vous, toi, quelle vie, quel présent ? Ce qu’on nous raconte, tu crois que je n’entends pas, dans les livres aussi, avec Hanna, on a lu tous les livres, peut-être pas tous, mais beaucoup, c’est des histoires, qui les écrit ces histoires, qui écrit cette histoire-là ? Une histoire où on est soumis, Romains, Turcs, Français, colonisés. On est persécutés et chassés d’Espagne, on dit « le Siècle d’Or », il est loin le siècle d’or et peut-être qu’il n’était pas si glorieux que ça, ce siècle d’or, en Espagne, en Orient, on parle des cours royales, princières, et le peuple, il est où ? Et l’histoire coloniale, on est toujours des pauvres types, pauvres, ignorants, exploités, résignés… Sur plusieurs siècles, combien d’années de résistance, quelques tribus rebelles, l’Émir a été vaincu, des tribus l’ont trahi, l’Émir noble prisonnier, mais il a été battu et après lui quelques insurgés déportés… Et les soldats de l’Armée d’Afrique, j’ai vu le film Indigènes, des héros ? Les tirailleurs, nos ancêtres, dans les guerres coloniales, du côté de la répression militaire contre des révoltés à mains nues, c’est vrai ou non ? Madagascar, l’Indochine, la Tunisie, le Maroc, la Syrie… et j’en oublie Alors toutes ces histoires, cette Histoire où on est toujours du mauvais côté, j’en veux pas, tu m’entends, j’en veux pas. La guerre de libération nationale, sept ans et après. Les pays indépendants, dis-moi comment ils gouvernent pour leurs peuples, dis-moi. Et toi, ton pays, qu’est-ce qu’il te donne ?Pourquoi tu restes ici, pourquoi ? Et l’immigration, comment on nous présente ? u le sais toi, même quand on veut nous défendre ou plutôt vous défendre, vous, les immigrés, comment ? Dis-moi, toi, des victimes sourdes et muettes, c’est vrai ou c’est pas vrai ?… non, je dis moi, ça suffit, barakat, ça suffit, tu comprends ? » C’est tout le drame de sa vie, ce fils inaccessible dont il pressent un destin tragique.
Tout au long de ce magnifique roman, nous assistons à cette déchirure, à cette impossibilité d’atteindre le fils tant chéri. Et Leïla Sebbar écrit une véritable ode aux immigrés qui rend ce roman encore plus émouvant, plus touchant.
L’écriture est très fine, ciselée même Leïla Sebbar s’affranchit des règles classiques de la ponctuation, notamment au niveau des dialogues, ce qui rend le récit beaucoup plus réaliste et donne le rythme du langage oral au récit.
Dans ce roman, le lecteur retrouvera les thèmes qui sont chers à Leïla Sabbar et sur lesquels elle a déjà tant dit, où il lui reste, on le sent bien, tant à dire encore. Dans ce roman, elle a réussi à toucher nos âmes.
Alma est écrivain public à la grande poste d’Alger. Sa maman qui est en Bretagne promet toujours de revenir et tarde à le faire. Son papa est musicien, il joue du luth.
L’histoire se déroule pendant la décennie noire, au moment où les attentats sont nombreux et où ils confisquent la vie. L’époque des intégristes qui détruisent un peu plus encore une jeunesse qui n’a rien demandé : « Nous, on ne pense pas, on pense rien, on veut vivre et on vit pas… chez nous presque tous les hommes ont pris le maquis pour la guerre de libération, ils sont pas tous morts, les vieux sont pensionnés, des petites pensions pas comme les autres, les colonels, les généraux, tout ça… Quelle guerre pour tous ces galons ? Le maquis ? Alors combien d’officiers supérieurs, s’ils sont encore vivants ? La guerre contre les islamistes ? La guerre civile ça donne des galons ? S’engager dans l’armée, dans la police, on aura du travail, on sera les plus forts contre les frères… On veut pas. On fait de la musique… »
Tous les jours, Alma retrouve le vieil homme qui a rempli sa vie dans les usines Renault de Billancourt et invariablement commence une lettre, toujours la même qui ne s’achève pas, par « Mon cher fils… ». C’est l’occasion pour le vieil homme de confier sa vie à cette jeune fille et de lui dire combien son fils lui manque. L’oreille de l’écrivain public est sans doute d’autant plus attentive et bienveillante qu’elle-même souffre da sa séparation avec sa mère. Ils partagent aussi tous les deux la difficile communication avec deux êtres chers. Petit à petit, Alma partagera ses confidences avec le vieil homme et ce sera aussi l’occasion pour elle de parler de la servante Minna, véritable seconde mère qui est une magnifique conteuse.
Au fil des pages, on apprend que le vieil homme n’a jamais pu ou n’a jamais su parler de sa vie à son fils lorsqu’il était avec lui en France. C’est pas faute d’avoir tenté pourtant. Une fois, lors d’une tentative, le vieil homme a entendu son fils pour la dernière fois : « … c’est tes histoires et l’Algérie je n’ai pas envie d’en entendre parler, ni la guerre, ni avant la guerre, ni rien. La vie c’est le présent et vous, toi, quelle vie, quel présent ? Ce qu’on nous raconte, tu crois que je n’entends pas, dans les livres aussi, avec Hanna, on a lu tous les livres, peut-être pas tous, mais beaucoup, c’est des histoires, qui les écrit ces histoires, qui écrit cette histoire-là ? Une histoire où on est soumis, Romains, Turcs, Français, colonisés. On est persécutés et chassés d’Espagne, on dit « le Siècle d’Or », il est loin le siècle d’or et peut-être qu’il n’était pas si glorieux que ça, ce siècle d’or, en Espagne, en Orient, on parle des cours royales, princières, et le peuple, il est où ? Et l’histoire coloniale, on est toujours des pauvres types, pauvres, ignorants, exploités, résignés… Sur plusieurs siècles, combien d’années de résistance, quelques tribus rebelles, l’Émir a été vaincu, des tribus l’ont trahi, l’Émir noble prisonnier, mais il a été battu et après lui quelques insurgés déportés… Et les soldats de l’Armée d’Afrique, j’ai vu le film Indigènes, des héros ? Les tirailleurs, nos ancêtres, dans les guerres coloniales, du côté de la répression militaire contre des révoltés à mains nues, c’est vrai ou non ? Madagascar, l’Indochine, la Tunisie, le Maroc, la Syrie… et j’en oublie Alors toutes ces histoires, cette Histoire où on est toujours du mauvais côté, j’en veux pas, tu m’entends, j’en veux pas. La guerre de libération nationale, sept ans et après. Les pays indépendants, dis-moi comment ils gouvernent pour leurs peuples, dis-moi. Et toi, ton pays, qu’est-ce qu’il te donne ?Pourquoi tu restes ici, pourquoi ? Et l’immigration, comment on nous présente ? u le sais toi, même quand on veut nous défendre ou plutôt vous défendre, vous, les immigrés, comment ? Dis-moi, toi, des victimes sourdes et muettes, c’est vrai ou c’est pas vrai ?… non, je dis moi, ça suffit, barakat, ça suffit, tu comprends ? » C’est tout le drame de sa vie, ce fils inaccessible dont il pressent un destin tragique.
Tout au long de ce magnifique roman, nous assistons à cette déchirure, à cette impossibilité d’atteindre le fils tant chéri. Et Leïla Sebbar écrit une véritable ode aux immigrés qui rend ce roman encore plus émouvant, plus touchant.
L’écriture est très fine, ciselée même Leïla Sebbar s’affranchit des règles classiques de la ponctuation, notamment au niveau des dialogues, ce qui rend le récit beaucoup plus réaliste et donne le rythme du langage oral au récit.
Dans ce roman, le lecteur retrouvera les thèmes qui sont chers à Leïla Sabbar et sur lesquels elle a déjà tant dit, où il lui reste, on le sent bien, tant à dire encore. Dans ce roman, elle a réussi à toucher nos âmes.
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