mercredi 17 août 2011

El Moudjahid : Nouveau plan de Circulation à Constantine

Constantine : Un nouveau "plan de circulation d’urgence" pour le centre

Un "plan de circulation d’urgence", à même de décongestionner les différentes artères et d’organiser les flux de circulation et de déplacements urbains, sera mis en place au centre-ville de Constantine

PUBLIE LE : 02-07-2011 | 18:54

Un "plan de circulation d’urgence", à même de décongestionner les différentes artères et d’organiser les flux de circulation et de déplacements urbains, sera mis en place au centre-ville de Constantine "avant la rentrée sociale", a indiqué jeudi le directeur des Transports. Une enveloppe financière de 90 millions de Dinars a été débloquée pour concrétiser ce nouveau plan de circulation devenu, selon M. Abdelmalek Djouini, "vital" dans une ville qui étouffe sous le poids d’une circulation automobile et piétonne "infernale". Selon le même responsable, l’acquisition d’un millier de plaques de signalisation et la réparation des feux tricolores dans les différentes intersections et ronds-points du centre ville, figurent parmi les actions d’urgence qui seront menées dans le cadre de ce nouveau plan de circulation.
Destiné à fluidifier le trafic dans la zone dite "hyper-centre de Constantine", ce nouveau plan de circulation sera exécuté en trois phases pour permettre à la population de mieux s’adapter avec les nouveautés qui seront introduites dans la circulation automobile dans cette ville, a encore souligné M. Djouini.
Les concepteurs de ce nouveau plan de circulation ont préconisé, dans une première étape, la transformation de la rue du 19-juin (ex-rue de France) en voie piétonne et l’interdiction de stationnement de chaque côté de la rue mitoyenne Larbi Ben M’hidi, communément appelée, à Constantine, "Trik J’dida".
Le stationnement des véhicules sera également interdit rues Aouati Mostefa (ex-rue de Sétif) et Messaoud Boudjeriou (Saint Jean), à proximité du marché Bettou, a ajouté M. Djouini. Ces mesures d’urgences devront dynamiser le fonctionnement du nouveau parking à étages situé dans la rue Zaâmouche, a souligné le même responsable précisant que ce parking à étage réalisé pour régler le problème de stationnement dans la ""ville des ponts" continue de fonctionner en deçà de ses capacités faute de textes actualisés réglementant la circulation routière au centre-ville.
Les parkings des "S" (nom donné à une rue serpentant à hauteur du marché Bettou jusqu’au Coudiat) seront mis à contribution pour permettre une meilleure application de ce nouveau plan de circulation, présenté comme la seule alternative face à l’asphyxie constatée au centre-ville, a encore indiqué le même responsable.
Il sera procédé dans le cadre de ce plan à la création de deux nouveaux circuits, le premier allant du parking à étages de la rue Zaâmouche jusqu’à Bab El Kantara, en passant par le pont Sidi Rached, les allées Benboulaïd et la rue Larbi Ben M’hidi.
Le second trajet reliera les mêmes quartiers de Zaâmouche et de Bab El Kantara via le pont Sidi Rached, le boulevard Messaoud Boudjeriou, l’avenue Belouizdad, l’avenue Abane Ramdane, les allées Benboulaid et la rue Larbi Ben M’hidi, a précisé le directeur des Transports.
La station de taxis et de bus de l’avenue Rahmani Achour (ex-Bardo) verra une nouvelle domiciliation dans le cadre de ce nouveau plan de circulation puisqu’elle sera transférée vers le parc communal situé juste à côté mais assez loin des habitations, a fait savoir le même responsable.
Il sera procédé au titre des seconde et troisième phases à l’ouverture des souterrains du centre-ville à la circulation piétonne et à l’installation de barrières aux abords des places du 1er-novembre et des Martyrs pour séparer la circulation piétonne et automobile, a-t-on précisé. Dix-neuf autres artères et 7 carrefours situés dans les quartiers Filali, Coudiat, Ziadia, Sidi Mabrouk et Casbah, entre autres, seront ultérieurement touchés par des actions d’organisation routière initiées dans le cadre de ce nouveau plan de circulation, a-t-on également noté. La "plate-forme de la circulation routière" dans la ville de Constantine sera "complètement métamorphosée" d’ici à quelques mois avec la réception du tramway et de la dernière tranche de l’autoroute Est-Ouest qui imposeront une amélioration dans le mode de gestion routière, a conclu M. Djouini.

Algérie-Focus : Un chanteur tunisien expulsé (2)

“Je n’ai jamais insulté l’Algérie,
j’ai parlé du mal qui règne dans les pays arabes ” :
Bendir Man raconte son expulsion de l’Algérie

Algerie-Focus.com : Vous avez été expulsé récemment d’Algérie avec une interdition d’accès au territoire algérien, alors que vous participiez à un concert de musique, sur invitation de Baâziz. Pouvez-vous nous dire les raisons qui ont motivé cette expulsion ?
Si je le savais, je vous l’aurais dit volontiers. J’ai juste fait une petite intervention avec Baâziz, je n’ai rien dit d’arrogant ni de déplacé, j’ai juste chanté des chansons que j’ai faites pour la Tunisie. 
A l’aéroport dimanche, j’allais partir quand au checkpoint l’officier me demande d’attendre, ( j’étais avec mon producteur). Ils sont allés au bureau et les agents sont revenus pour me dire : “tu vas partir maintenant mais tu as une interdiction du territoire algerien.” J’ai demandé pourquoi, on ma répondu : “Si tu as un problème, tu vas le regler avec le consulat”. C’est ça en gros ce qui s’est passé.

Comment ressentez-vous cette expulsion ?
Je n’en comprends toujours pas les causes. Je n’ai jamais insulté l’Algérie ni aucune personne, et je n’ai pas à intervenir dans ses affaires internes. Tout ce que j’ai fait c’est la chanson sans plus. Je ne suis pas donneur de leçons ni exportateur de révolution  comment on me l’a reproché, je suis un chanteur qui chante dans son deuxieme pays, l’Algérie, et qui dit les choses comme elles le sont, qui parle de la pauvreté, de la dictature, du chômage, de tout le mal qui règne dans les pays arabes et du tiers monde.

Un journaliste d’El Watan a écrit sur facebook que le chanteur Baâziz essaye de justifier votre expulsion en disant que c’est un coup médiatique dont vous profitez pour avoir de la publicité. Que lui répondez-vous ?
Baâziz est un grand frère pour moi et j’ai voulu lui rendre hommage en Tunisie en l’invitant à Carthage où il avait critiqué le pouvoir tunisien et où tout le monde  avait rigolé, tunisiens comme algeriens. Même le consul algerien était présent et c’était plus que sympatique car ça ne dépassait pas la rigolade.
Je respecte beaucoup Baâziz pour dire quoi que ce soit de mal sur lui. Je dis juste que je n’ai rien inventé, car il faut être un très bon mythomane pour creér tout ça.

Comment comptez-vous réagir après cette affaire ?
On m’a conseillé de me rendre au consulat, je vais le faire en respectant les procédures.  Je dis qu’il ne faut pas gonfler ce problème tout en le laissant entre nous, car il ne faut pas que les gens qui ne veulent pas que l’union des frères et soeurs maghrebins soit faite, aient cette chance de nous voir désunis. Je le dis à tous les médias : je n’accepterais jamais qu’on dise du mal de la Tunisie tout comme de l’Algerie.
Est-ce que vous pouvez chanter librement en Tunisie maintenant que Ben Ali est parti ?
Bien sûr qu’on peut chanter librement, la Tunisie est un pays en voie de devenir un pays démocratique, et on sera tous unis pour dépasser le stade transitoire. Il reste encore des problèmes, c’est tout à fait normal, car pour bâtir une démocratie il faut du temps et beaucoup de perseverence, et je suis très optimiste, je sais que mon pays progressera avec le temps, tout comme je le souhaite pour tous les pays arabes.

Un dernier mot ?
Dernier mot : un seul match de foot a montré au monde combien le Maghreb est uni et le sera encore plus inch’Allah.

Propos recueillis par Fayçal Anseur

mardi 16 août 2011

Dernières Nouvelles d'Algérie : un chanteur tunisien expulsé

Le chanteur tunisien Bendir Man
expulsé d’Algérie pour avoir critiqué
les dirigeants algériens

Auteur de chansons satiriques, le tunisien Bayram Kirani, alias Bendir Man, a été « expulsé » par les autorités algériennes dimanche 14 août a annoncé l’intéressé sur ses comptes facebook et twitter. Cette expulsion a été assortie d'une interdiction de territoire algérien, a-t-il ajouté. Les autorités algériennes lui reprochent, selon ses propos, de vouloir exporter « les pensées de la jeunesse tunisienne ». C'est-à-dire, révolutionnaires.



Bendir Man se trouvait en Algérie pour tenir deux concerts d’affilée : le premier à Alger et le second à Bejaia. Vendredi 12 août, Bendir Man accompagné du chanteur algérien Baâziz a été invité à quitter la scène au beau milieu du deuxième concert, prétextant un problème de sono, raconte le site tunisien Webdo.
Le chanteur tunisien, contacté par ce même journal, a livré son récit des faits. « Tout a commencé la veille (jeudi, ndlr), lors du premier concert, quand Bendir Man a chanté ‘99% chabaa dimokratia’ (99% plein de démocratie), une parodie sur les élections pipées. Quand les spectateurs en liesse ont réclamé des noms, Bendir Man a tout simplement répondu ‘les dirigeants arabes, comme celui que nous avions en Tunisie, et que vous avez présentement’. Ce qui n'a pas manqué d'enflammer la foule de spectateurs, au point qu'à la fin du concert, certains ont crié ‘Baaziz président, pouvoir assassin !’ »
Ces propos, Bendir Man, allait les payer cher puisque le concert de Bejaia a été avorté. « Vendredi, l'organisateur a été sommé d’arrêter le deuxième concert, chose qu'il a refusée et le ‘show must go on’, mais au milieu du concert, la sono, sabotée, a tout simplement explosé’. Le concert a été arrêté. Les spectateurs sont restés sur leur faim », poursuit la même source.
Dimanche 14 août, une fois à l'aéroport, le vol de Bendir Man a été retardé d'une heure et quart. Pendant ce temps, selon le site tunisien, Bandir Man « a été questionné durant tout ce temps. Son bagage a été fouillé, et pour finir on lui a montré une feuille officielle mentionnant qu'il était désormais interdit de séjour en Algérie. Les policiers l'ont accusé d'exporter la révolution. Propos auquel, l'artiste a répondu que ce n'était pas des conserves de tomates».
« L’Algérie est un très beau pays, l'accueil et les gens sont très hospitaliers, mais sans être donneur de leçons, c'est dommage qu'avec autant de ressources et de richesses, ce pays se retrouve avec un taux de chômage élevé et un système aussi corrompu que le nôtre », a encore confié Bendir Man.
Aussitôt révélée, la nouvelle de son expulsion a suscité un élan de solidarité et de réprobation de ses nombreux fans.
Ce n’est pas la première fois que ce chanteur soit décrété persona non grata. Après deux ans de carrière, cet homme de 26 ans n’a pas eu le droit de donner un seul concert en Tunisie ou de diffuser sa musique du temps du règne absolu de Ben Ali
Pourtant, sa voix et ses chansons ont retenti plus fort avant et après la révolution du jasmin, faisant de Bendir Man un symbole. Ses chansons circulaient d’ailleurs sous le manteau.
Dans sans pays natal, Il a fallu attendre la chute de Ben Ali pour que Bayram organise des concerts.
Les textes caustiques de Bendir Man, accompagnées avec un peu de reggae, de sonorités nord-africaines et de musique traditionnelle tunisienne, révèlent les travers de la société tunisienne et plus particulièrement ceux du régime.
Cet artiste impertinent qui vit entre Paris où il poursuit ses études (master en sociologie du sport) et la Tunisie, est devenu rapidement la coqueluche des Tunisiens. Il compte plus de 150 000 fans sur MySpace et près de 120 000 amis sur Facebook. C’est grâce d’ailleurs à ces réseaux sociaux que les chansons de Bendir Man ont trouvé écho auprès d'une bonne partie des Tunisiens.

lundi 15 août 2011

Dernières nouvelles d'Algérie

L'arnaque de décembre 2010 :
«L’offensive de grande envergure»
contre Al Qaïda en Kabylie

La fin de l’année 2010 et les six premiers mois de l’année 2011 ont été marqués par des événements qui ont fait la Une des médias algériens. Surexposés ou surmédiatisés, ces événements se sont révélés comme des flops ou des arnaques. Grande offensive antiterroriste en Kabylie, ouverture des médias publics au pluralisme, agrément de nouveaux partis politiques, nouveau billet de 2000 dinars, dépénalisation du délit de presse... DNA revient au cours de cet été sur ces grandes arnaques qui ont fait les choux gras de la presse. Premier épisode : La grande offensive de l’armée contre Al Qaïda en Kabylie.



Tout le monde a tartiné dessus, DNA y compris avant que nous décidions de ne plus publier une ligne supplémentaire sur le sujet.
Des hélicoptères, des blindés, des milliers d’hommes en renfort, les réseaux de téléphonie mobile brouillés, l’opération lancée par l’armée en décembre 2010 a été présentée, nous l'avions présentée, comme une offensive de grande envergure contre les groupes d’Al Qaïda au Maghreb islamique qui infestent les maquis de Sidi Ali Bounab, en Kabylie. On allait voir ce qu’on allait voir en matière de lutte anti-terroriste.

Retour sur cette grande offensive médiatique

Sauf que huit mois après cette opération, on ne sait fichtrement rien de ses résultats. Et on en vient même à douter qu’elle ait eu lieu, du moins dans les propensions et l’ampleur que la presse lui a donnée. Une opération flop ? Une manipulation ? Retour sur cette grande offensive médiatique.
Mercredi 9 décembre 2010, la presse, y compris DNA bien sûr, annonce qu’une opération militaire est en cours dans les maquis de Sid Ali Bounab, réputés depuis le milieu des années 1990 comme un fief des groupes armés affiliés à Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), dirigée par Abdelmalek Droukdel.
Objectif ? Faire capoter une réunion que ce dernier préparait avec ses troupes, dont plusieurs émirs, dans ces maquis touffus et presque impénétrables de Kabylie.

3000, 4000, 5000, 6000, 7000 soldats engagés dans la bataille

Des milliers de soldats, 3000, 4000, 5000, 6000, voire même 7000, sont lancés dans la bataille. Des hélicoptères et des blindés sont dépêchés en renfort pour appuyer les troupes sur le sol. Des officiers supérieurs de l’armée, on parle même de deux généraux et d’un patron d’une région militaire, supervisent les opérations.
Les réseaux téléphoniques des trois opérateurs, Djezzy, Nedjma et Mobilis, sont brouillés et deviennent même inaccessibles dans plusieurs localités de Tizou Ouzou, Bouira et Boumerdés. Le grand ramdam!
Cette offensive rappelle celle menée par l’armée durant l’automne 1997 contre les fiefs du GIA, à Thala Acha, à Sidi Moussa, et à Oued Allen, dans les plaines de la Mitidja.
A une différence prés. A cette époque, les journalistes étaient conviés à assister aux briefings quotidiens conduits par le général Fodhil Cherif. Ils avaient même droit d’interroger des terroristes capturés au cours de cette opération.
En décembre 2010, l’offensive de l’armée contre les maquis d’Al Qaïda s’est faite dans l’opacité la plus totale.
Il n’empêche…

Dix, vingt, vingt cinq terroristes tués

Au cours des cinq premiers jours qui ont suivi le début cette offensive, des informations commencent à filtrer dans la presse. On y évoque le déroulement des opérations, les moyens engagés ainsi que les premiers résultats, c'est-à-dire l’élimination de plusieurs terroristes.
Dix, vingt, vingt cinq, les chiffres varient selon les titres et les sources.
Parmi les activistes éliminés, on dénombre deux gros poissons. Le premier n’est autre que le chef d’Al Qaïda au Maghreb, Abdelmalek Droukdel. L'homme donné mort, les services de sécurité se seraient ainsi rendus chez sa famille pour prélever des échantillons d’ADN pour aider à son identification.
Le second, s’il n’a pas l’envergure de son chef, n’est pas moins connu : c’est Abdelkahar Belhadj, fils d’Ali Belhadj, ancien numéro deux du FIS. Des échantillons d’ADN on été prélevés auprès de ses proches pour aider à l’identification de son corps.

Sources anonymes

L’opération se poursuit pendant plusieurs jours. Si la presse continue de publier des détails parcellaires mais plus ou moins précis, les autorités elles ne soufflent pas mot. Pas le moindre communiqué du commandement de l’armée, pas le moindre début d’une déclaration du ministère de l’Intérieur. C'est à peine si les médias n'inventaient pas cette opération...
Diable ! 7000 militaires lancés aux trousses d'Al Qaïda en Kabylie, deux généraux engagés dans la bataille, le chef même d'Al Qaïda au Maghreb islamique qui serait élimé au cours des engagements militaires et les officiels ne pipent pas un mot! Cette opération, à ne plus en douter, est une invention de journalistes...
C’est que, comme de coutume, les informations sont livrées par des sources anonymes, d’honorables correspondants qui refusent d’être cités.
Le premier, le seul et dernier responsable à s’exprimer sur le sujet est le Premier ministre Ahmed Ouyahia. Interrogé mercredi 22 décembre 2010 par des journalistes, le chef de l’Exécutif confirme le déroulement de l’opération mais refuse de s’attarder sur la question. « Le bilan de l’opération vous sera fourni par les services concernés », répond-t-il laconiquement. Sans plus !

C’était six mois plutôt

Six mois plus tard, on ne sait toujours rien de cette opération. Les « services concernés » n’ont pas fourni de bilan et la presse n’a plus communiqué sur le sujet depuis lors. Abdelmalek Droukdel mort ou encore vivant ? On attend toujours les résultats des échantillons de son ADN prélevés en décembre 2010.
Le fils de Belhadj éliminé en décembre 2010 au cours de cette l’opération en Kabylie ? Selon notre confrère de la presse arabophone Ennahar (édition du mercredi 27 juillet), ce dernier a été plutôt abattu lundi 25 juillet à Thénia, à 100 km à l’est d’Alger, alors qu’il transporterait une ceinture bourrée d’explosifs.
L’opération de l’armée en Kabylie ? Une grande opération qui retombe comme un soufflé.

samedi 13 août 2011

La Médina de Constantine

Le Ramadhan, ses saveurs et ses attraits

le 13.08.11 | 01h00
Ammi Mahmoud entame sa journée tôt le matin. Du haut de ses 60 ans, ce retraité, enfant de la médina de Constantine, n’a rien perdu de sa verve et de sa bonne humeur. « Même durant le mois de Ramadhan, je ne change pas mes habitudes », dit-il d’un ton jovial.
Dès 7h, ammi Mahmoud prend le bus du centre-ville à partir de la cité Sakiet Sidi Youcef où il habite depuis les années 1980, après avoir quitté la maison de ses parents à Souika. « Je garde toujours des liens avec mon quartier natal que je visite tous les jours », relève-t-il. Comme pour une escapade, il commence par une virée à la rue Mellah Slimane. « Chaque Ramadhan a un cachet inédit et inusité dans ce vieux quartier où les gens de la ville, quel que soit leur statut social, viennent même de loin faire leurs emplettes ici, où ils trouvent de la marchandise à bon prix, notamment la viande, mais aussi tous les ingrédients et les produits alimentaires pour faire des plats à la saveur typiquement constantinoise, même si les traditions et les mœurs ont beaucoup changé », assure-t-il. Il est vrai que certains profitent aussi de ce mois pour faire des affaires au gré des « humeurs du ventre ». L’image des ces vendeurs de petit-lait, servi dans des bouteilles en plastique ou même des sachets de congélation, confirme les clichés qui collent encore à ce mois, durant lequel certains consommateurs, assommés par le jeûne, n’hésitent pas à «ramasser» toutes sortes d’abats exposés aux poussières et visités par des nuées de mouches.

Des vendeurs de djawzia (nougat au miel et aux noix), de loukoum (halwet halkoum), de halwet turque et autres confiseries sorties de nulle part occupent les petits espaces qui restent entre les petites échoppes ne laissant qu’un infime passage aux piétons. Après les salamalecs d’usage à l’endroit des vendeurs de fruits secs, pruneaux et abricots séchés, l’on se dirige tout droit vers la place d’El Batha, en empruntant la rue Sidi Nemdil. Le local de Chabani Abdelaâdhim, maître incontesté de la fameuse harissa au miel, ne désemplit guère. La canicule de ce mois d’août n’a pas dissuadé une foule qui assaillit les lieux comme les abeilles, une ruche. « Tu me donnes une snioua (un petit plat dans lequel on sert la harissa) bien arrosée au miel, car celle d’hier, était presque sèche », s’écrie une dame voilée dont le corps a pris la moitié du comptoir. La harissa de ammi Chabani, succulente et fondant dans la bouche, est très célèbre même en dehors de Constantine. « C’est devenu presque une marque que certains commerçants véreux ont exploité à leur propre compte en prétendant vendre la harissa d’El Batha un peu partout dans la ville et même dans des wilayas voisines », dira ammi Mahmoud. Le patron des lieux a même collé un avis sur le devant de sa boutique. Une sorte d’avertissement pour ces clients afin d’éviter d’acheter « une fausse harissa d’El Batha », chez un commerçant « chinois ». Comme quoi, on n’hésite pas à usurper la fonction d’un préparateur de harissa. A 11h, le mercure monte, la chaleur devient insupportable dans ces venelles où l’on se dispute le moindre petit bout d’ombre.

Des vagues humaines à Trik Djedida

Sur le chemin vers la rue Larbi Ben M’hidi, plus connue par Trik Djedida (ex-rue Nationale), le passage par la rue Sellahi Tahar, dans le quartier de Sidi Bouannaba, du nom d’un saint de la ville, est inévitable. Difficile de se frayer un chemin entre une nuée de vendeurs proposant des bouteilles de jus et de « gazouz », du pain sous toutes ses formes et ses couleurs, des galettes maison, du «matloû» et des feuilles de bourek. Parmi les piétons, il y a plus de curieux que d’acheteurs.


Les rues à Constantine ont beaucoup plus d’importance que les édifices et les logements. « Les gens, regardez-les, sont des maniaques de la déambulation ; ils tournent en rond comme dans une cour de prison ou un camp de concentration. Que deviendraient-ils si l’on n’avait pas ouvert dans la ville toutes ces artères, bien qu’elles soient étroites et sinueuses ?», est-on tenté de paraphraser cheikh Abdelmadjid Boularouah, héros du roman Ezilzel (le Séisme) de Tahar Ouettar. Ammi Slimane évite de s’attarder sur les lieux. Il a d’autres chats à fouetter. « Je dois faire un saut à Rahbet Essouf (la place de la laine), ex-place des Galettes, où je dois passer voir mon ami Hadj Rabah, celui qui prépare la fameuse zlabia, format Boufarik », lance-t-il. Il faut jouer des coudes pour traverser la rue Kadid Salah, ex-rue Combes, devenue un souk spécial où l’on vend tout ce qui est féminin, de la petite lingerie, aux gandouras, en passant par le cosmétique. « C’est un véritable souk enssa (souk des femmes) qui occupe une partie importante du vieux quartier de R’cif ; les seuls hommes qu’on y trouve sont les commerçants », ricane ammi Slimane. Après un raccourci par le quartier El Djezzarine, qui abrite les petites échoppes des tripiers, on arrive devant le sabat (passage voûté) de la mosquée Sidi Lakhdar, qu’on traverse à la hâte pour se retrouver à Rahbet Essouf.

Téléphérique

Curieusement, il n’y a pas assez de monde devant le vieux local de ammi El Hadj Rabah. Ce dernier, la soixantaine bien entamée, garde toujours sa forme. Assis tranquillement face à un grand poêle, vêtu d’un tablier blanc, une chéchia sur la tête, une serviette mouillée autour du cou, il manie la pâte avec dextérité. Sans jamais s’arrêter, il joue avec un ustensile en forme d’entonnoir pour dessiner des morceaux de zlabia grand format, qui prennent une couleur dorée une fois plongés dans une bassine de miel. «Malgré le poids des années et les tentations du commerce lucratif, El Hadj Rabah n’a jamais pensé délaisser un métier qu’il exerce avec passion et patience», explique ammi Slimane. Ce dernier, après avoir acheté deux kilos de zlabia dorée, reprend le chemin du retour après une journée harassante. A quelques encablures de là, il y a la station du téléphérique, juste à proximité du vieux quartier Echaraâ, dans le temps celui des juifs de Constantine. « J’adore prendre ce moyen de transport, histoire de contempler le rocher et ses merveilles avant de rentrer chez moi », dit-il. 

Arslan Selmane

vendredi 12 août 2011

Le cri, nouvelle de Maïssa Bey

Le cri, nouvelle de Maïssa Bey


"Attends-moi, attends-moi… " Elle court, mais elle n'arrive pas à rattraper son frère. Il vole presque, dans le sillage d'un cri, sauvage, interminable. Elle court, de la force de ses petites jambes, mais il est déjà loin. C'est qu'il est plus grand qu'elle, il a neuf ans! Et puis c'est un garçon. Il passe son temps à courir avec ses copains, pendant qu'elle joue à la poupée en bas de l'immeuble, toujours à portée de voix et de regards de sa mère.

Elle, elle n'a que six ans. Et puis, elle n'a pas compris tout de suite, elle n'a rien compris d'ailleurs, elle le suit c'est tout, comme d'habitude. Elle voudrait seulement que ce cri s'arrête, que son frère aussi s'arrête, pour l'attendre. Elle a beau l'appeler, il ne se retourne pas. Il ne peut pas l'entendre. Elle n'a pas encore traversé la cour de l'immeuble, étrangement déserte et silencieuse, qu'il est en haut des escaliers comme happé par ce cri dont il a immédiatement su d'où il venait, avant même qu'il ne l'atteigne, elle. Au pied de l'escalier, elle s'arrête. Parce que son coeur bat trop fort. Parce qu'elle ne peut plus respirer et que le cri s'enfle en un trille démesuré. Soudain, elle ne peut plus bouger.

Comme dans ce rêve qu'elle fait souvent, où poursuivie par des êtres sombres et grimaçants, des monstres, elle ne peut s'enfuir. Elle veut avancer mais ses jambes ne lui obéissent plus. Quelque chose de plus fort que sa volonté la cloue au sol et ses pieds, son corps sont retenus par des milliers de fils invisibles. Elle ne peut même pas se débattre, comme paralysée. Une sensation effrayante et familière. Exactement comme dans ses rêves d'où elle se réveille en hurlant et que sa mère sait effacer à force de baisers et de tendresse. Elle réussit enfin à lever le bras. Elle s'accroche à la rampe. Les marches se déforment sous ses yeux tandis que le cri, un instant arrêté, reprend, se module en variations stridentes puis en son articulés mais inintelligibles. Elle finira par les monter ces marches. Elle ne sait comment. Très vite peut-être ou très lentement, une à une. Elle n'en a pas souvenir. Des blancs dans sa mémoire. Mais il est là, devant elle, le visage de sa mère.

Méconnaissable. Lacéré. Larmes de sang. Son corps qui se balance de droite à gauche, tel celui d'un automate détraqué. Ses mains frappant ses cuisses comme pour rythmer cette danse étrange. Ses yeux qui se posent sur elle, sans la voir, sans la reconnaître. Et la petite fille recule, se détourne. Le rêve est trop effrayant. Il faut qu'elle se réveille, qu'elle s'échappe… Déjà, la nuit dernière, quand ces hommes sont venus emmener son père, elle avait réussi à croire, malgré les coups violents frappés à la porte, malgré les cris et les supplications de sa mère, malgré les sanglots et les lamentations de sa grand-mère qui l'avait serrée très fort contre elle pour l'empêcher de se lever, elle avait réussi à croire que ce n'était qu'un rêve, et elle s'était rendormie, bercée jusqu'au matin.

Et puis, le jour venu, on l'avait envoyée jouer dehors, sous la surveillance de son frère, elle n'avait même pas posé de questions, pressentant obscurément sans doute que la réponse viendrait assez vite.

Elle redescend, poursuivie par le cri jusque dans le coin sombre en bas, sous les escaliers, là où elle a l'habitude de se terrer quand elle joue à cachecache avec les autres enfants. Elle s'assoit sur le sol froid, glacé. Se recroqueville toute. Porte ses mains à ses oreilles, en appuyant très fort. Elle ferme les yeux, et essaye, essaye désespérément de tout oublier, de tout abolir. Parce que, même si elle n'a que six ans, elle sait que c'est comme ça la mort, c'est son père qui lui a expliqué un jour. C'est quand on dort au fond d'un trou et qu'on ne peut plus se réveiller. La mort ce n'est qu'un long sommeil et elle veut, elle aussi, mourir un petit peu, comme son père.

Peut-être a-t-elle traversé ainsi des frontières et des frontières, jusqu'au seuil du néant. Elle en est revenue cependant. Elle va rester ainsi. Des heures entières. Jusqu'au soir. On ne la cherche pas. Sa mère ne s'inquiète pas. Et la fillette, frigorifiée, engourdie de douleur et de peur aussi, immobile dans son coin sombre, ne peut pas oublier; elle entend au-dessus de sa tête le bruit incessant des pas. Il vient du monde, beaucoup de monde chez eux. D'autres hurlements feront écho à ceux de sa mère. Et le cri ne s'apaise que pour mieux renaître. Seule, dans sa cachette obscure, la petite fille dont personne ne s'inquiète ne pleure pas. elle a mal, très mal, mais elle ne sait où. C'est dans sa tête. Dans son corps. C'est quelque chose qui s'écoule d'elle. Un peu de son enfance peut-être. Quelque chose qui la quitte. Et cela fait un vide. Cela fait mal. Elle va finir par s'endormir. Les enfants finissent toujours par s'endormir. Et elle se retrouvera le lendemain, elle ne sait pas comment, dans une autre maison, couchée dans un lit qui n'est pas le sien. Non, elle ne sait pas comment, mais ce n'est qu'un blanc, un autre blanc dans sa mémoire.