mardi 2 août 2011

Il l'aimait (4)

Entre inquiétudes et espoir…

Lorsque les islamistes ont commencé à faire sentir leur influence, il eut très peur pour cette terre. Comment pouvait-on en arriver là ? Il était si fier du combat des femmes algériennes ! Il n’était pas possible que ce pays devienne une République islamiste. C’était tellement contraire à tout ce qui caractérise l’Algérie… Il est vrai que les erreurs accumulées et l’affairisme ne pouvaient que favoriser les visées des « barbus », d’autant qu’ils ont vite compris que l’on peut tenir le peuple par deux choses : le mystique et le ventre.

En octobre 1988, des milliers d'Algériens descendent dans les rues des grandes villes pour exprimer leur « ras le bol » par rapport aux conditions économiques, au chômage, et surtout pour réclamer plus de libertés. Un grand mouvement de contestation populaire s’empare du pays, met en cause le pouvoir militaire en place et le force à faire des concessions pour rétablir le calme et, surtout, se maintenir au pouvoir. À l’issue de ces manifestations, le président Chadli Ben Djedid autorise la tenue d'élections multipartites dans le pays. Des formations politiques autrefois interdites pourront désormais participer aux élections aux côtés du FLN. Une nouvelle constitution instaurant le multipartisme est adoptée en 1989. Parmi ces partis d'opposition, le Front islamique du salut (FIS), recueille un succès étonnant aux élections municipales de 1990.

Son espoir de 88 se transforme dès lors en inquiétude. Inquiétude renforcée par le fait que ses correspondances avec Mourad ne trouvent aucun écho. Ses appels téléphoniques sont sans succès. Il n’arrive pas à se faire à l’idée que l’islamisme pouvait avoir un tel succès sur le sol algérien. Fallait-il que la population soit malheureuse pour en arriver à de telles extrémités !

Le discours du FIS fait mouche chez les Algériens, révoltés par des années d'inflation, de crise du logement et d'appauvrissement. Partout, des éléments les plus durs du FIS imposent la doctrine islamiste par la force. La terreur s’installe dans le quotidien des gens. En décembre 1991, le premier tour des premières élections législatives libres donne une majorité de sièges pour le FIS au Parlement. Il est catastrophé, comme beaucoup de progressistes en France et il ne supporte pas d’être loin de ces évènements : du haut de son impuissance, il assiste au désastre !
Aujourd’hui encore, en dépit d'une certaine période d'accalmie au début des années 2000, l'Algérie est périodiquement secouée par des vagues de violence qui, chaque fois, rappellent qu’ell'e n’a pas vraiment gommé cette décennie noire. La population reste meurtrie et divisée. Elle a du mal à croire au retour de la paix et de la prospérité. La violence intégriste guette toujours. Le chômage reste endémique. La crise du logement perdure et la jeunesse est désabusée. On est d’autant moins rassurés que l’avenir a du mal à se dessiner, eu égard au faible niveau de politisation de la population. Dans ses nombreuses rencontres, en 2004 et 2005, il observera combien l’individu prend le pas sur les idées, combien la construction d’un vrai pluralisme est loin des préoccupations des gens. Pendant que l’on est tout entier tourné vers la survie et hanté par l’illusion de l’émigration, on ne peut pas imaginer un vrai changement possible !

Combien le passé pèse lourd dans cette affaire ! Qu’il sera long le chemin qui mènera l’Algérie à un épanouissement démocratique lui permettant de mettre ses richesses à la disposition du plus grand nombre ! En même temps, il lui faut bien admettre que ce sont les Algériens et rien qu’eux qui ont les clefs.

C’est pourquoi, loin de cette terre, sans bulletin de vote, il ne lui reste plus comme perspective que de tisser patiemment les liens de l’amitié entre les peuples, seuls capables d’ouvrir plus encore ce pays au Monde et permettre petit à petit l’édification d’une société nouvelle, fondée sur son peuple libre et pleinement responsable de son avenir.

En effet, on n’effacera pas les dommages de l’Histoire. Après la conquête de 1830, la colonisation, la guerre d’indépendance, le socialisme des premières années de l’indépendance, la corruption, le pouvoir de l’armée, le chômage, le gâchis de la jeunesse, la décennie noire, la « concorde civile » et ses effets pervers, on mesure le poids du passé. On ne peut s’empêcher de se sentir responsables, pour une grande part, de tous ces malheurs. Il ne s’agit surtout pas de repentance dans les mots. Il est urgent que, conscients des responsabilités de l’ancien dominateur colonial, la France, dans les actes, aide l’Algérie à sortir de la crise morale et sociale qu’elle continue de vivre. Force lui est de constater que ça n’est pas le cas aujourd’hui. De la même façon que la guerre d’Algérie a été instrumentalisée pour cause de politique intérieure, aujourd’hui la France choisit toujours la politique politicienne au détriment du rapprochement des deux peuples. Le projet de « traité d’amitié » est remis aux calendes grecques et la politique menée par Nicolas Sarkozy n’indique rien de bon en ce sens.

A suivre...

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